samedi 6 août 2022

Sur des mots de Laurence

J’observe cette grande pièce nue du Palais des Congrès dans laquelle ne subsistent plus que les deux chaises où avaient eu lieu les premiers interrogatoires des suspects dans cette affaire…

Il s’agissait à l’origine d’organiser des jeux stupides en réunion où les participants choisissaient tour à tour une personne présente pour y jouer le rôle du souffre-douleur ou du bouffon, selon un tirage au sort préalable…

Cela avait mal tourné. Un grand manitou à la tête de nain de jardin avait proposé une danse nuptiale et une femme avait été désignée pour être la victime expiatoire du groupe. Cette femme, véritable diamant noir, était accusée d’être à l’origine de cette odeur poisseuse comme un vermouth renversé. Dès le début de la danse, le charme de la belle opéra, puis tout à coup le son de la détonation fut aussi bref et la jeune femme s’écroula comme victime d’une attaque. Le groupe s’assura très vite que le cœur de la femme avait cessé de battre. Les pompiers arrivés très vite ne purent que constater le décès. La police, elle, entama l’enquête au sujet de cette mort bien mystérieuse.

Sur des mots de Magali

Il est là passif, à ravaler la souffrance de la rupture, lui ai-je fait peur ? quand il l’avait vue avec cet inconnu au parc, il n’avait pas pu se contrôler. Elle aimait fumer dans l’herbe, lui aussi. Il avait frappé le sol avec sa canne en bois. Paf ! Traitresse ! De la musique lui sifflait dans les oreilles. Une musique de western, une musique de vengeance. Paf !  Lui ai-je fait peur ? Elle a l’air surprise, elle siffle un air de saloon. Paf ! Lui ai-je fait peur ? Elle recule, se contorsionne, prend l’allure d’un python royal, les yeux hypnotiques. Cette femme aime se transformer. Elle ondule et se réfugie dans un buisson du parc. Lui ai-je fait peur ? Paf ! Elle s’en moque et rit.


Homme seul dans la pénombre (vu par Laurence)

Il était là dans la pénombre. Puissant, intense, un diamant noir. Un regard hypnotique, une fine bouche sensuelle et énigmatique. Oh le bel ourlet sous la barbe épaisse. Je me cache pour ne pas qu’il me voit, j’ai une folle envie de l’étreindre, de l’embrasser, de respirer tout son être. Même cette odeur poisseuse, comme un vermouth renversé, un bidon d’essence prêt à flamber, ne fait que réveiller mes sens.

Mon tendre et cher, serait-il un assassin ?

J’ai bien vu, qu’il observait en retrait le duo à plumes qui s’accouplait, dans une danse nuptiale. Deux gros oiseaux blancs au long duvet, à l’envergure identique. Deux siamois, deux albatros qui s’entrelacent. Son œil pétillait en les voyant. J’ai ramassé au sol des lunettes infrarouges. Comme il était excitant de le voir sous des traits bleutés, qui dessinaient sur son visage une expression toute nouvelle pour moi ; celle de la satisfaction de celui qui s’apprête à faire, celle de l’extase avant l’action, celle de l’excitation retenue pour assurer la beauté de geste. Qu’allait-il faire mon bien aimé Ah !

Le son de la détonation fut aussi bref que le frottement du phosphore de l’allumette sur son grattoir. Les deux volatiles s’enflamment dans un feu d’artifice chorégraphié et symétrique.

Homme seul dans la pénombre

Entrant dans cette salle, je suis frappé par l’obscurité qui y règne et la présence de cet homme entre deux âges apparaissant dans un clair-obscur, bien isolé. Son visage à moitié éclairé semble baigner dans le mystère.

Seul, avec cette présence à quelques mètres, je suis assailli par le doute car cela ne correspond pas à la réunion que j’étais censé rejoindre en cette soirée d’avril pour y réaliser des photos pour un casting… Par réflexe, je prends une photo de ce personnage qui semble autant surpris que moi, puis bredouille quelques mots d’excuse et referme rapidement la porte derrière moi.

Puis, une fois séparé de lui, j’essaie de calmer en moi une forme de peur qui m’a saisi dans ce huis clos. Il y régnait outre cette obscurité une forte humidité accompagnée d’une odeur fétide que j’ai interprétée comme l’arrivée d’un évènement insolite ayant pu provoquer une forme d’absence chez cet être semblant venu de nulle part.

Mon cerveau se met alors à imaginer différents scénarios ayant pu aboutir à cette présence. Peut-être cet homme est-il venu pour faire un constat sur un incident domestique survenu dans le bâtiment comme une fuite d’eau par exemple… Mais cela pourrait bien être un évènement plus grave comme une bagarre ayant mal tourné… La peur ressentie face à son expression de surprise ne m’a pas permis d’en savoir plus en essayant d’échanger avec lui.

 ///

Pour en voir le cœur net, je décide de revenir dans la pièce et j’ai alors la surprise d’apercevoir au fond de la salle maintenant éclairée deux êtres entre clowns et poètes qui semblent répéter des exercices d’acrobaties sous un échafaudage. Le tableau est magnifique et l’homme aperçu précédemment a disparu. Je reste bouche bée en admiration devant cette scène de joie légère et d’envol vers un ailleurs. Je ne peux m’empêcher d’assister à ce spectacle qu’ils jouent tous deux comme des personnages de cirque en pleine harmonie.

Quel peut être le lien avec la scène d’origine de cet homme seul ? Peut-être est-ce tout simplement le metteur en scène sur le point d’assister à cette répétition en costumes pour bien percevoir le rendu de cette scène dans son spectacle.

Balayant d’un regard rapide l’ensemble de la pièce, je devine dans un coin dans la pénombre une présence silencieuse qui semble conforter mon interprétation. Il ne me reste plus qu’à profiter du spectacle et attendre la fin pour en savoir plus…


Festival Off

Avignon, théâtre du jour. Je suis accueilli par le doute. Est-ce du Molière ou du Racine ? Je suspend mon jugement.
Les exercices d'acrobaties stylistiques ont d'antiques traditions. Je donne dans une cour sans miracle. Trop d'oracles ont péroré, prendre au sérieux une prédiction, est une ineptie d'empire. Le monde qui vient est vieux.

La salle de classe

Ouah, quel contraste dans cette salle ! L’intervenante y fait un exposé sur le Royaume d’Islande et ses curieuses habitudes en matière de sexualité dans les hautes sphères de la Cour au siècle dernier. Cette belle femme d‘âge mûr brandit un grand compas en plastique comme pour illustrer son angle de vue particulier sur ce sujet scabreux.

En bon paparazzi, je la prends en photo dans cette position à la fois imposante mais assortie pourtant d’un regard désespéré face à l’attitude de son auditoire. En effet, à l’autre bout de la pièce, ces derniers réunis en groupe se marrent en prenant pour certains des photos au flash, comme pour garder un souvenir de cet instant délicieux.

Rient-ils de la conférencière semblant se prendre au sérieux ou profitent-ils pour étaler leur joie suite à des échanges scabreux entre eux ? J’en arrive à penser que le sujet exposé a fait naître chez eux des souvenirs qui semblent aller bien au-delà des aventures de la couronne d’Islande.

Bernard

Le Bouffon du Roi

Stupeur ! Pris en défaut ! C’est qui ces deux abrutis ! Et qu’est-ce qu’il fout à poil ce connard ? Deux têtes de buses, à mon avis c’est un jeu stupide. Il y en a un qui est plus connard que l’autre et qui se fait mener par le bout du poil du cul, qu’il a épais.

Un Président et son souffre-douleur, son bouffon, son fou du roi. La pièce est imprégnée d’odeur corporelle de bites, de poils, de pets, de transpiration musquée. Un air d’euphorie et d’emprise aussi. Ils ont dû pousser le bouchon jusqu’au fond de l’anus, voir si l’autre pignouffe se défroquerait. Le pseudo-président avait trop une gueule de benêt pour être capable d’imaginer un jeu pervers, juste l’humiliation de le mettre tout nu lui suffisait. Un Ministre et son alternant ? ça peut aller jusque-là, la politique. C’est une soif de pouvoir, une soif de lèche-les-bottes crottées d’une merde molle et collante de l’autre, quoiqu’il avait l’air dégoûté l’autre pignouffe, larbin de mes deux, d’être à oilpé.

Mais je crois me souvenir avoir vu un autre type en arrière-plan. Je ferme les yeux et je me concentre, c’est bien un gars portant un bonnet rouge et un livre à la main que j’ai vu. Le grand Manitou à la tête de nain de jardin ! Un jeu à trois. Les politiques, ça a toujours un marionnettiste dans le dos. Ça se voyait bien qu’il n’y avait aucune connivence sexuelle entre le costumé et l’enculé de déculotté. Un remake de la Révolution ? Bonnet frégien, sans-culotte, noble à la redingote et au verbe haut. L’autre gueule de Cousteau qui tient les manettes du Politicien. Le manipulateur manipulé ; l’arroseur-arrosé. Donc, le politicien s’adonnait aux plaisirs sadiques d’asservir son fieffé humilié alors que lui-même était sur commande. Voilà ce que j’ai vu.