D'où vient cette pipelette en bikini qui marivaude dans le jacuzzi avec un gringalet en bermuda ? Serait-elle aussi amère qu’une faisselle, aussi bisque que sa couleur homard, aussi spongieuse que ses pieds fripés à force de tremper dans l’eau ? Elle a la nuque noircie par endroit sous le collier farci, de pierres précieuses en toc. Sa peau fait l’effet d’un plastoc à base d’amidon de maïs et pas de pétrole prosaïque. J’ai rêvé d’un monde sans velcro, d’une page sans ratage, d’un air sanctuaire, d’une vie à la Robinson verni de chrysalides. Une métamorphose. Pourquoi vivre détaché du vivant ? S’appliquer à s’épiler, se botoxer, se chirurgiefier ? J’ai des poches plein les yeux et des bouées plein le ventre, j’ai cessé les flexions et génuflexions. J’accorde à ma petite personne autant de temps qu’à ma daronne. Pourquoi je ne l’appelle plus, du reste ? Du reste de fenouil, que, lors de ses 60 ans, je n’avais pas voulu manger, parce qu’il avait traversé 500km avant d’atterrir dans mon assiette (Italie/Marseille) ? Elle m’avait traité d’Ayatollah du légume. J’ai pas piqué des vers, ni labouré la terre. J’ai juste constaté qu’un légume qui peut pousser dans le jardinet, n’a pas besoin de voyager. Elle avait récupéré les tiges à feuilles vert pomme, qu’elle m’a enfoncées dans le nez pour me chatouiller les poils. Depuis, je n’ai pu plus la sentir et je suis devenue un petit poireau déraciné, qui s'est arraché à la terre d'où il vient. Arraché mais avec des racines, longues, entremêlées, limites ridicules et encore terreuses. Boules d'argile qui ne se décollent pas. Pulpe pueuse, je m’approche de la pipelette, mais c’est le gringalet qui m’alpague. « Qu’est-ce que tu fouettes ! » me dit-il me repoussant de ses cinq pistils. Je cille, à peine, et je plaide une place dans le jacuzzi. Quoi que ce gringalet en pense, les effluves de la bimbo d'à côté, déjà blette créent un nuage de plus en plus aigre que les bulles du Jacuzzi tentent de contenir.
Un petit bruit vient ponctuer les éclats
de rire verts de la presque belle et le gringalet gobe-mouche n'entend rien.
C'est comme un petit sifflement. Les seins du cageot flottent toujours sous le
nez du benêt, aucune chance que le silicone soit en fuite. Le sifflement se
précise, poussée par le doute je me retourne. Un beau trognon serait-il tombé
sous le charme de mes aisselles frisées et ruisselantes ? Faux espoir. Le
sifflement persiste, turbulence maximum à la surface de l'eau, bouillonnement
intense, de plus en plus difficile à associer à la température des deux corps
caleux près de moi.
Mue par l'instinct de survie du légume
libre, je laisse la tourterelle au soutien-gorge à piles et le pigeon amoureux
à leurs regards ventousés et m'échappe du pot en ébullition. Triste fin du
homard ébouillanté et de son accompagnant fleuri, loin de leur rêve de Copacabana.
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