Je vous présente Elmire. C'est une jeune fille dont le prénom suffit à la décrire (Prénom d'origine arabe et qui veut dire princesse). Grâce, élégance, savoir mais jamais loin de l'arrogance, enfance protégée, elle n'a pas eu besoin de guerroyer pour exister et bénéficier des douceurs de la vie. Attention à celui ou celle qui la traiterai de baronette. Sa jactance est douce, fluide mais pleine de réserve, elle préfère la giguedouille aux balivernes. Depuis que sa route a croisé celle de la LIMACE (Ligue pour l'intelligence Médiévale et L'Amour Courtois Eternel) elle n'est jamais redescendue de son balcon. Son père soucieux de son éducation l'avait inscrite à un stage de rénovation, sur le chantier de réhabilitation du château de Margot de Scoraille. Difficile de rendre compte ici de la déconstruction mentale qui s'en suivit. Dormir à plusieurs sous une tente, partager la douche ou le tuyau de douche, recevoir des injonctions incompréhensibles, faire sa pitance, ne plus être le centre du monde. Cette expérience aurait été une arme de destruction massive sans l'aide inconditionnelle de LUC président de la LIMACE. Elle le vit pour la 1ere fois, à la lueur du feu de camp, leurs regards se croisèrent sous le ciel étoilé (si si, promenez-vous entre le Causse Méjean et le Causse Noir, et dès la tombée du la nuit on peut encore voir des étoiles, ce n'est pas que dans la littérature). Pour lui plaire elle ne parla plus qu'en langage médiéval, et Luc accumula les exploits les plus extraordinaires pour lui prouver sa passion et devenir son troubadour. Les poèmes qu'il lui dédie, lui sont comptés et chantés par Cloud fidèle serviteur de Luc. Cela fait 6ans déjà, et sous ces airs de la « Dame de Haute Savoie » Elmire est complètement paumée, enfermée mais protégée par cette mise à distance volontaire de la langue. Elle ne fréquente que des poètes armés de vielles et tambourins. Casque sur les oreilles, elle hoche la tête, yeux fermés, en phase avec le dernier Rap Occitan du moment. La nuit tombe. Cela fait une heure qu'elle attend assise là celui qui doit la conduire au castel de Luc pour le réveillon.
C'est ici que le chemin de Claude Brunet va croiser le sien. C'est un petit homme encore jeune, épaules rentrées, trapu, habillé sobrement, le noir est sa couleur préférée. Toujours dans ses pensées, il est agité du dedans et du dehors ; Il sautille en permanence, exprime peu d'avis sur rien et lorsque la situation l'impose il parle très brièvement. Sa ponctuation préférée est « Tu vois ! »
Difficile de savoir s’il s'agit d'un manque de vocabulaire, d'une pensée si concentrée qu'elle ne peut être expurgée, ou alors de son enfance. Sa mère était chanteuse d'opéra. Il a passé beaucoup de temps dans les coulisses, à quatre pattes dans les froufrous. Il a appris très tôt à faire silence, sans déranger, des silences yeux grands ouverts, des mains joyeuses qui viennent caresser le bambin. Le bambin a grandi et à 15 ans, ossu mais de petite taille, légèrement vouté (signe habituel de ceux qui ont grandis trop vite, mais ce n'était pas son cas), sa discrétion a fini par ne plus suffire, car ses yeux brillaient trop à la vue des bas, des corsets, des connivences, des caresses furtives. Voir mais ne rien dire, ne rien faire fut insuffisant et sa mère finit par lui dire : tu vois ? Tu vois bien. Tu n'es plus à ta place ici. La semaine suivante il était inscrit à la salle de boxe la plus proche....La boxe est devenu son métier, sans gloire mais pro quand même. Il a dû raccrocher les gants parce les ko à répétions commencer à laisser quelques trous dans sa mémoire. La vie est un peu compliquée pour lui en ce moment, à la recherche d'un nouveau boulot, cherchant où est vraiment sa place, il vient d'accepter à la dernière minute de se rendre à un réveillon ; Il regarde le GPS, il arrive à la dernière station avant le col de l'Iseran et le point de chute. Faut vraiment qu'il fasse une pause, le brouillard s’épaissit et il va devoir être concentré sur la route.
La station est bondée, le parking a l'air plein, il s'arrête à la pompe du fond prés de la boutique. Il tire, tire mais le tuyau n'est jamais assez long pour atteindre le réservoir, en fait une Nana, casque sur les oreilles, a son pied dessus.
Lui : Je crois que ton pied
bloque la pompe, tu vois ?
Elle :......
Lui (se rapprochant et
parlant plus fort) Tu me gêne là, tu me pompe l'air, tu vois ?
Elle : hola, mécréant, ne
me bouscoulez point, j'avions pas vu.
Lui : (se radoucissant
et essayant de rompre la gêne, parce que c'est pas son genre de s'imposer)
Je me dépêche parce qu'il y a du monde, tu vois.
Elle:(intriguée par le petit
homme sautillant) Peut-être.....j'ai vu plein de gens rentrer mais personne
ne sort.
Lui : C'est les vacances,
ils prennent leur temps, tu vois !
Elle : Peut être mais c'est
un peu inquiétant, c'est comme si la station les avait aspirés
Lui : ah, ah tu as de
l'humour et un drôle de vocabulaire.... La boutique pompe l'air, c'est pour ça
qu'ils sont aspirés, tu vois ?
Elle : C'est de l'humour
courtois. Tu entends la populace qui s'égosille ?
Lui : Ils ont mis Dance for
Me en fond sonore et en boucle, normal que les gens soient soulés, c'est le 31
mais faut pas exagérer ; Tu enfermes des gens qui ne se connaissent ni
d'Eve ni d'Adam, ils viennent pour faire la pause et subissent une musique
débile, pour peu qu'on les oblige à mimer la chorégraphie, ça chauffe tu
vois !
Elle : Tu sens ? ça
puir !
Lui : Pas possible !
Ils ont tous voulu à sortir à la fois et le tourniquet s'est bloqué tu
vois !
Elle : sieur, je
trouille ; La boutique les aspire et puis les brulent comme les sorcières.
Lui : Je t'explique, le
frottement crée de la chaleur et la chaleur au bout d'un moment ça prend feu,
tu vois ?
Elle : Alors avec l'essence
tout va exploser ?
Lui : C’est possible !
Les flammes à proximité de l'essence, mmm …. tu vois ?
Elle :
Tudieu, quelle malenvature, ne lâchez point ma menotte, encore une charmogne de
la reine mère
Lui : T'es fatiguante, je
comprends rien de ce que tu me dis, tu vois !
Elle : Mais enfin aidez-moi,
arrêtez de croquer marmot. Elle s'approche malgré la chaleur insupportable, un
bruit de chute d'eau énorme la stoppe, le feu s'éteint et de l'eau coule sous
la porte
lui : La chaleur a fait déclencher toutes
les chasses d'eau à la fois, bizarre ! Pas normal, incroyable cette protection
incendie. De toute façon c'est trop tard pour les consommateurs du jour, seront
tous consumés, tu vois !
Elle : et moi qui convoyait
pour retrouver mon Luc ! (Elle pleure)
Lui : chacun pour soi,
fuyons, quand tout aura bien brulé ça va s'écrouler tu vois !
Elle : Quel couard faites-vous,
maroufle vous fuyez, alors que vous est membru et que vous pourriez en sauver
quelques-uns.
Lui : Pas d'exagération, et
puis à force de s'en foutre de la planète ! Pas la moindre chance de
salut. Alors mourir en bouffant du petit prince, à prendre la madeleine pour
des biscuits, où à cause du réchauffement de la planète, je vois pas la
différence tu vois !
Elle : Merdaille, alors on
va tous trépasser ?
Lui :
C’est ce que l'on appelle la loi du « après moi le déluge » tu
vois ? C'est parti !!!! mon plein est fait en route pour la prochaine
zone de frottement. Faudra faire attention aux guirlandes et au DJ surtout.
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