Ce jour-là [...] j'aurais voulu sortir crier sur tous les toits que OUI, il est possible de changer. Et c'est ce que j'ai fait. En descendant les escaliers j'ai croisé ma vieille voisine, et lui ai servi une remarque bien sentie quand elle a, pour la énième fois, ignoré mon "bonjour". Arrivée dans la rue je me suis défoulée sur un homme qui avait laissé son chien déposer son "offrande" par terre sans la ramasser. Ragaillardie, j'ai poussé jusqu'à toquer à la vitre d'une automobiliste garée en double file sur une voix de bus. Puis je suis allée boire un café au soleil. Je me sentais bien, légère. Un peu comme la première fois où j'ai osé quitter la maison alors que ma mère était en pleine crise. Je m’en rappelle encore comme si c’était hier. Mon cœur palpitant dans ma poitrine, subtil mélange de peur et de liberté. Je n’avais que 8 ans et mis à part aller chercher le pain à la boulangerie du coin de la rue de notre maison je n’étais jamais sortie seule de chez moi. Mais ce jour de septembre 1997 je me sentais forte comme jamais, prête à mettre à l’épreuve ma liberté. Ma mère était dans la cage d’escalier, en proie à une crise de paranoïa, elle hurlait qu’il manquait des marches et qu’elle ne pouvait donc descendre prendre son café. Je lui préparai son café et lui en fis sentir l’odeur, je dévalais et remontais l’escalier plusieurs fois de suite mais elle ne bougeait pas et continuait d’hurler :
- Cléa s’il te plaît fais quelque chose, il manque des marches à l’escalier, je vais être en retard au travail.
Ce jour-là nous avions prévu avec ma mère d’aller au marché acheter des pommes pour faire une tarte. Après quelques tentatives pour la ramener dans une autre réalité, je m’assis à la table de la cuisine quand je vis un chat par la fenêtre qui explorait le jardin et semblait bien étranger aux cris de ma mère. Je sortis donc par la fenêtre sans rien dire et fut envelopper d’une douce sensation. Le soleil réchauffait mon corps et mes tremblements de peur s’estompèrent. Je traversais une légère phase d’euphorie et partie sur les traces du chat. Au bout d’un moment, quelque peu lassée de sa compagnie, il semblait ne pas faire attention à moi, je décidais de franchir l’angle de la boulangerie pour voir par- delà les murs de mon enfance. C’était le jour du marché et je me retrouvais ballotté entre les passants, d’un stand à l’autre, du crieur aux poissons, à la gentille vieille dame qui vendait des confitures. Je finis par me retrouver devant le stand des fruits et expliquait au vendeur que ma maman n’avait pu venir, qu’elle le payerait la semaine suivante. Je pris mes pommes et rentrais à la maison. Comme quoi on n'est jamais mieux servi que par soi-même.
Aussi lorsqu’une quinquagénaire, lunettes noires et air pressé, s’assis à la table voisine et continua sa conversation téléphonique, en faisant profiter tout le monde et pestant sur le serveur qui allait trop lentement, et sur cette terrasse pas si jolie, et ces fous de plus en plus présents, je ne pus m’empêcher de lui arracher son téléphone et de l’écrabouiller sous mes pieds.
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