lundi 5 juin 2023

Un visiteur à une heure pareille?

Nuit, à peine levée, je venais toujours à l'aube me répandre de pleurs sur la tombe du paternel, c'était une habitude que j'avais prise chaque matin, je me posai là comme un gros nounours aux larmes de crocodile qui malgré son embonpoint et son air pataud s'allègeait de sa tristesse. 

Le crissement du portail me surprit alors. Un visiteur à une heure pareille?  L'oiseau de mauvaise augure se faufila entre les tombes avec vélocité. Il se planta à côté de moi, il avait l'allure d'un croque-mort.

- Bonjour.

Même sa voix me glaça le sang.

- Bonjour, on se connait ? lui répondis-je. 

- Je crois bien oui. Klaus Meine pour vous servir.

Ses yeux me mangeaint de l'intérieur.

- Je regrette, je ne vous remets pas. 

 - Allons Ulrich ! C'est moi Klaus, nous étions dans le même groupe de rock ! "Still Loving You", ça te rappelle quelque chose ?

- Bien sûr ! Klaus! Tu sais, maintenant, je suis trop vieux pour me réjouir.

Il mit sa main sur mon épaule. Je me trouvai paralysé. Sa main appuya plus fort. 

- Cesse de me toucher, je ne suis pas ton fils !

- Certes non, mais un lien puissant nous unit. Tu te souviens de Send me an Angel?

J'eus l'impression que mes pieds se figeaient au sol. Il posa son autre main sur mon épaule, je m'enfonçai dans le sol et derrière mon blouson en cuir, sous ma cage thoracique, aux pectoraux développés, je sentis mon cœur cogner.

- C'est pas mon heure encore, laisse-moi pleurer mon père.

- Envoie-moi un ange !

La silhouette de Klaus s'étira, j'eus l'impression qu'il grandissait. Non, c’était plutôt mon ombre qui s'allongeait. Je sentis dans le dos deux pointes qui poussèrent comme deux crochets de scorpion qui se seraient enfoncés dans ma peau. Klaus se tapit au sol, il eut un sourire contagieux comme venimeux. L'acide coula dans mes veines. De toute ma corpulence velue, je m'effondrai sur la tombe. 

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