vendredi 3 mai 2019

Identité Mutante


Miroir aux alouettes, tiroir aux oubliettes. Front en affront, cheveux tirés en arrière. Effacement des traits, le nez en éperon. Visage noirci, ombres pleines, yeux absents, crânerie du crâne, nudité frontale, bouche scellée. Mystère voulu.
Il a changé, il s'est glissé, il a passé son temps, il a rangé son patronyme, vivre caché à soi-même, sous une appellation nouvelle. Faire semblant pour être moins tremblant. Identité formelle, acceptable pour que le fond tienne. Cache-cache avec le vice, pour arracher la vie à la mort, pour ne pas être recherché, nomination nouvelle pour déminer le soupçon. Grimer sa vie, grimacer son existence pour éviter d'être cible, pour résister, pour donner le change, se faire ange ordinaire, pour ne pas passer pour le démon de service, le criminel désigné par l'arbitraire d'un état totalitaire. Planquer sa vibration, cliver son cas.
Mais voilà, quelqu'une le reconnait, boulevard Balthazar devant un magasin de farce et attrape, et pas n'importe qui, Violaine Casimir, la catcheuse tueuse de légionnaire, libérée par l'occupant, tout content qu'il est, qu'elle ait occis des opposants potentiels, juste avant la guerre. Elle a eu le temps de se faire juger, mais pas celui de se faire décapiter, alors libre, elle collabore de guinguettes en ghettos.
Aie, aie...se dit le démasqué, pas méchante la Violaine, certes mais pas discrète pour autant. Il avait fait sa connaissance, à quelques années d'ici dans un bastringue de Belleville, place du Combat. Toute une histoire de folklores et d'ambiances ou la vie facile s'ouvrait la nuit à la lumière des lampions, où l'on buvait, à la santé des champions. Violaine n'a peur de rien, vit de cris et de soifs. La retrouver là est incommodant. Heureusement, la relation est bonne, reste à lui faire croire à une locale histoire amoureuse secrète pour espérer qu'elle n'ébruite sa présence et son identité. La rendre mutique à son sujet.

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