jeudi 17 décembre 2020

à la caisse de la superette

Martine est une dame entre deux âges, bigote, bourgeoise désargentée, érudite et seule. Son manteau élimé aux manches et au cou témoigne d’un passé cossu. Ses cheveux poivre et sel, sont toujours bien coiffés, tenus par un gros peigne orné de strass dont 2 sur 3 manquent. Elle semble vivre 40 ans en arrière mais utilise toutes les technologies modernes sans cesser de les dénigrer. Elle a le verbe haut et campe sur ses convictions, persuadée de détenir le vrai.

Jacques est un jeune retraité qui déguste sa 2èmme vie avec délice, chaque heure, chaque jour, chaque moment. Ancien cadre dans l’industrie, il a un regard empathique sur tout et sur tous. Il est heureux, en bonne santé, aime plaisanter, cuisiner, et choisir des cadeaux pour tous ceux qu’il aime et il aime tout le monde.

Un jour Martine attend à la caisse d’une superette. Pour maintenir des prix bas et économiser du personnel, une seule caisse est ouverte. La file est longue, la caissière dolente, semble inexpérimentée.

Martine crie tout haut :

- on ne peut pas ouvrir une autre caisse ; c’est inadmissible ça !

Derrière elle, un monsieur sourit :

- Il est 12h30, Madame, c’est l’heure de leur pause.

- Je vous ai sonné, vous ?

- Dring, dring, répond Jacques, j’ai entendu dring…

- D’abord tenez-vous à distance. Un mètre SVP

- C’est que j’avais envie de me rapprocher de vous : vous avez l’air si aimable.

Un soupir, puis – Ah, vous avez acheté un sachet de 2 kg de pommes ? Elles sont bonnes ?

- Je viens de les acheter, je ne les ai pas encore goutées figurez-vous !

- Madame aura de quoi croquer la pomme : c’est une source vive…Je ferais bien votre Adam

- Vous ? avec vos cheveux au vent et vos dents toutes neuves ? Non , mais ,regardez-vous !

- Un miroir, un miroir SVP clame Jacques à la file qui se distrait de l’anecdote.

Une jeune femme, amusée, lui tend un petit miroir de poche en riant.

- Ah, belle dame vous avez raison : j’ai l’air de descendre de la vie sur Mars !

In volontairement, Martine esquisse un sourire qui n’échappe pas à Jacques.

Doucement il susurre –Vous avez un joli sourire…Permettez-moi de vous aider à porter votre sac.

- Hum..bah…si vous voulez ! dit Martine qui, enfin, est arrivée à la caisse.

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